@Nelkka tu te demandes ce qui me paraît le plus approprié pour un primo investisseur mûr ?
Je vais te faire un digest des bases théoriques sur le sujet. Non pas que j’ai pas beaucoup plus que les bases là -dessus, mais ça devrait être assez pour te donner des éléments de réflexion.
Ton sujet a un petit nom : c’est le problème intertemporel d’allocation des actifs. Il a commencé à être craqué par Merton (prix Nobel, mais pour un autre sujet). L’idée est de choisir un portefeuille pour optimiser l’utilité, c’est-à -dire la satisfaction que tu pourras retirer de ton investissement.
Il y a plein de subtilités (par exemple : comment mesurer l’utilité) et ça devient fichtrement compliqué dès qu’on rajoute des contraintes au modèle (notamment en faisant varier dans le temps l’espérance de rendement des actifs). Néanmoins, il existe une solution « basique » qui détermine comment répartir ton portefeuille entre l’actif sans risque (livrets, fonds Euros, obligations d’état à court terme) et les actifs risqués (actions, obligations à long terme).
On appelle ça la fraction de Merton : (µ - r) / (sigma² * gamma).
- µ c’est l’espérance de rendement de tes actifs risqués.
- r c’est le rendement des actifs sans risque
- sigma c’est l’écart-type de tes rendements annuels
- gamma c’est un facteur d’aversion au risque.
Tu remarqueras qu’aucun de ces facteurs ne dépend de l’âge de l’investisseur ni de son niveau de richesse.
Maintenant, il faut estimer les paramètres !
Pour (µ - r) c’est compliqué car on essaie de prédire comment les actions vont se comporter dans le futur. Le passé n’est pas forcément le meilleur indicateur pour le faire (n’en déplaise à ceux qui disent que les actions vont faire du 7% annualisé parce que c’est en gros ce qui s’est passé avant). Personnellement, j’aime bien utiliser le CAPE de Schiller (encore un prix Nobel, lui aussi pour un autre truc !) pour évaluer la surperformance des actions sur le fonds Euros. Ainsi on aurait µ - r = 1/33 = 3%. On trouve aussi des estimations de surperformance entre 4% et 4,5% chez les auteurs qui jugent que la régulation des marchés a rendu le CAPE Schiller trop conservateur. On va couper la poire en deux et dire 3,6%
Pour sigma, je vais prendre la volatilité du MSCI World ces 10 dernières années (= je suppose que les marchés ne seront ni plus nerveux, ni plus apathiques que récemment) : 0,15.
Pour gamma, c’est à toi de jouer :
- Gamma = 1, c’est pour les joueurs de roulette.
- Gamma = 2 pour les investisseurs agressifs.
- Gamma = 3,5 c’est monsieur et madame tout le monde
- Gamma = 5 c’est les hypersensibles au risque.
Personnellement je suis entre 2 et 2,5 selon l’humeur du moment.
Avec ces hypothèses, la fraction action que Merton me suggèrerait de mettre en portefeuille serait de l’ordre de : 3,6% / (0,15 x 0,15 x 2,25) = 70%. Le français moyen serait à 45% d’actions. Si tu traines tes guêtres sur ce forum, on peut supposer que ton aversion au risque est entre la mienne et celle du français moyen : tu serais probablement serein entre 50% et 60% d’actions.
N’y vois qu’un ordre de grandeur : on parle d’estimer des choses complexes dans le futur et de mettre un chiffre sur son aversion au risque. Il y a donc une graaaaande marge d’erreur. Mais tu remarqueras qu’on retombe plus ou moins sur le portefeuille canonique des épargnants américains : 60% actions / 40% obligations.
A titre perso, je détiens ~45% d’actions mais avec ~50% de levier. Ca m’amène en gros à l’espérance un portefeuille à 70% d’actions, mais moins corrélé au marché actions (et donc qui gigote moins). Donc tu vois, je suis globalement dans ma fraction de Merton moi aussi.